James & Cie - Les écarts

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Les écarts, Les écarts de James

Brouillard et Fantaisie #4

Brouillard et Fantaisie #4

Trimbalant sa carcasse au cœur du brouillard, James songeait encore et toujours. Depuis combien de temps était-il partit ? A quoi ressemblerait son domicile ? Qu’allait-il faire des jours comme des nuits ? A quoi bon se torturer l’esprit… James était en exil, en errance. Une demi-vie dans laquelle il peinait à trouver son rythme. La ville était vide. Le ciel était toujours gris. Les murs étaient froids. Les bâtisses étaient vides. L’unique feu était le bout incandescent de sa cigarette. Cette tige qui l’aidait à tenir. Cette fumée qu’il expire et qui s’écrase contre les parois de son imaginaire. Où sont les rêves dans un monde qui dort ? Où sont les bruits qui se tapissent dans les silences ? Où se déclenche le scandale dans un monde si lisse ? Où trouver la lumière au cœur de la nuit ?

James baissa la tête vers le sol car ses pieds étaient bloqués. Il y avait du goudron, une masse noire dont il ne pouvait pas se détacher. Quelque chose était ancrée au sol – là. Une chose inerte, molle et dure à la fois. James ne pouvait pas se dépêtrer. C’était une marée sombre, chaude et froide, en ébullition et par moment si calme. La chose n’était pas sensé prendre forme et pourtant, elle en prenait le chemin… Lentement, une métamorphose insidieuse, étrange. Quelque chose d’enveloppant et de distant. James ne comprenait pas. Dans ce monde plein de fumée blanche, au cœur de cet univers translucide où rien ne tient, il était immobilisé. Essayant de se pencher pour toucher le sol, une sueur froide parcourra son dos. Il n’était pas seul… Il était observé ! Tournant lentement la tête, James était traversé par une montagne de regards. Des yeux fous qui battent des cils. Des pupilles qui le fixent puis qui partent dans tout les sens. Des yeux qui scrutent les moindres faits et gestes. James tourna rapidement la tête pour ne plus leur faire face. Son corps était devenu raide, pétrifié par la peur que d’autres horreurs émergent dans son dos. Face à lui, le goudron avait pris forme. C’était un corps, comme celui des mannequins de bois ou de cires. Un corps féminin, bien trop féminin pour qu’il soit réel. Une réalité bien trop forte dans cette atmosphère d’illusions et de folies. James n’y croyait pas. Tout ce qu’il avait pu saisir jusqu’ici n’était que brouillard, brume et fumée. Etait-ce là l’ultime fantaisie de ce monde ? Laissez croire qu’il y aurait une réalité. Une chose physique, si forte, si attirante qu’on souffrirait rien qu’en y pensant. Une dernière fantaisie soumise aux regards. Un dernier espoir visible par tous. Des yeux dans le dos qui se fixent, attendant un premier contact.

Tandis que James fume tout en refusant de croire à cette réalité, la fumée de sa cigarette parcours le corps allongé devant lui. Elle se fraye un chemin sur les contours, les rebords, les angles et les rondeurs. Elle s’étale puis se concentre – une route toute tracée. James s’arrête. Les ténèbres qui composent ce corps commence à l’engloutir. Il s’enfonce doucement dans le goudron. Les yeux qui l’observent ferment les paupières au rythme de sa descente. Il n’y a plus de fumée. Il n’y a plus de brouillard. Il fait noir. Une obscurité incomparable à la nuit. Un monde s’éteint. Seul reste un petit point rouge, plutôt vif. Une toute petite chaleur. Une braise minuscule. La dernière cigarette de James gît au sol – comme lui – et se consume.

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Brouillard et Fantaisie #4

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